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L'ancien blog du CDI de l'ESAAT
2 février 2012

Anthony Browne, l’amour du détail, l’amour de l’art

détails 002A l’occasion d’une conférence, d’un travail avec des secondes et de la sortie d’une  biographie écrite par son fils Joe Browne « mon métier, mon œuvre et moi » aux éditions Kalédioscope, j’aimerais vous faire partager mon plaisir de visiter et revisiter régulièrement l’œuvre d’Anthony Browne.

J’aime particulièrement sa science du détail. Il les dessine car ils permettent de rompre avec la monotonie de faire des dessins mais aussi parce qu’ils plaisent aux enfants. Il adore parsemer ses illustrations de clins d’œil de nature différente. Tout d'abord, des clins d’œil humoristiques nous rappellent les cartes postales qu’il dessinait en début de carrière. Il aime aussi reproduire au pied de la lettre des expressions anglaises comme dans cette illustration extraite « des invités encombrants » : egg plant (aubergine) devient une plante œuf ; green house (serre) la maison blanche, peinte en vert ; crab tree (le pommier sauvage) en arbre avec des crabes Il dissémine aussi des touches surréalistes faisant souvent référence aux œuvres de Magritte, Dali. : chapeau melon en lévitation, pipe, parapluie, fenêtre nuage, poisson volant dans la même illustration. Ses détails anecdotiques en apparence peuvent être porteur d’une importante signification au point que l’image devienne plus forte que le texte. Prenons par exemple le petit déjeuner Brownien. Il débute un certain nombre de ses albums et témoigne de l’ambiance dans la famille.anna1 004 Dans « Anna et le gorille », La perspective exagérée augmente encore la distance entre le père et sa fille. Le père ne communique pas, il se retranche derrière son journal. Les couleurs participent à la mise en place de l’ambiance : couleurs froides qui détonnent avec la robe rouge d’Anna. Les formes géométriques et l’ordonnancement de la pièce, la frugalité du petit déjeuner participent aussi de cette atmosphère. Sans oublier la place du père qui est encadré par un énorme frigidaire. Nous retrouvons cette situation dans l’album « Hansel et Gretel ». Les détails cachés sont ici aussi porteurs de sens. Nous sommes au début du livre, à la veille de l’abandon des enfants dans la forêt. L’ambiance est plus que morose. Il n’y a rien à manger sur la table. Le décor environnant est en parfaite harmonie avec la situation : couleurs maussades, état du sol et du plafond. Le tableau d’Holman Hunt « la lumière du monde », accroché sur le mur du fond, montre le Christ, porteur d’une lampe, frapper à une porte qui n’a pas été ouverte depuis longtemps, vu la présence d’herbes hautes au bas de celle-ci. Il vient éclairer, apporter la lumière dans ce monde ténébreux.. L’attitude des personnages démontre l’absence de communication, la tête du père une certaine résignation. La mère, la méchante marâtre, semble un peu à part. Des thèmes visuels hanse 002ajoutent leur petite note de désespoir. Tout d’abord, l’avion dans l’écran de télévision et l’ombre de l’oiseau signifient le désir d’échapper à cette situation. Les différents barreaux, des chaises, des vêtements mais aussi de la poupée face cachée sur le sol concourent aussi à cette situation d’enfermement. Au début de « dans la forêt profonde », le petit déjeuner montre aussi l’existence d’un malaise à l’intérieur de la famille. En effet, le père a disparu, à la suite d’une dispute avec sa femme et la mère ne sait pas où il se trouve. Nous voyons la même situation : les regards sont tournés vers la chaise de l’absent. La mère demeure dans ses pensées. La vulnérabilité de l’enfant et de la mère peuvent se deviner dans les lignes horizontales de la tasse et des habits. Les couleurs froides, les rayures de la chaise participent à la création de l’atmosphère. L’enfant est seul et doit faire face à une situation de crise sans compter sur un appui parental. Dans ce même album, l’illustration devient la projection de l’imaginaire de l’enfant. L’enfant, comme le chaperon rouge, traverse la forêt pour se rendre chez sa grand-mère. La forêt en apparence normale au début reflète son courage et sa résolution de braver l’interdit de sa mère. Mais au fur et à mesure qu’il s’enfonce dans la forêt, le chemin se rétrécit et disparaît, les arbres revêtent des pics et deviennent tortueux ou torturés les détails renvoyant à divers contes que sa grand-mère lui a racontés, se multiplient. Enfin, il rencontre quelques héros de ces histoires avec lesquels il n’arrive pas à nouer de véritables dialogues. C’est sa peur, sa peur panique qui ne va cesser d’augmenter qui se projette sur le décor et crée des images irréelles en noir et blanc comme dans un rêve. La peur est une création de l’esprit .et n’a que rarement des fondements réalistes. Nous imaginons, nous inventons nous-mêmes nos peurs

Nous pouvons lire et relire son œuvre, nous découvrons toujours des éléments que nous n’avions pas vus. Il voulait être le nouveau Francis Bacon. En tout cas, il est devenu un grand artiste de la littérature

Pascal Broutin

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